L’Assignat – Paris (75006)
03.09.17 - Guillaume - 716lavie
75006 Paris
Ouvert du lundi au samedi, le midi seulement
Métro : Saint Michel Notre Dame (4), Odéon (4)
RER : Saint Michel Notre Dame (B, C)
L’Assignat est ce genre de bistrot oublié dans des quartiers qui les ont vu disparaître. Enfin quand je dis oublié, je ne parle pas de la clientèle d’habitués qui continue de les fréquenter avec bonheur et un attachement non feint. Je parle plutôt de nous qui ignorons leur présence tout simplement parce qu’ils se font rares et que la presse/blogosphère n’en parle pas, enfin si, 716 le fait.
C’est un ami qui m’a proposé de nous retrouver là-bas pour déjeuner un samedi midi. J’ai donc entrepris mes recherches sur le web la veille afin de savoir de quoi il s’agissait. Sur google, je suis tombé sur des bons avis en majorité, quelques personnes s’offusquaient de la saleté ou du caractère bourru du patron. En prenant le temps de lire tous les commentaires sur les différents sites (trip advisor, yelp), de regarder les photos, je voyais que les plats avaient l’air sérieux. J’étais curieux de voir de quoi il retournait.
L’Assignat fut une monnaie révolutionnaire. “En décembre 1789, la Caisse de l’extraordinaire devait recevoir le produit de la vente des biens confisqués au clergé. Les assignats étaient des avances sur la vente des biens nationaux et portaient intérêt. Mais en septembre 1790, les assignats cessent de porter intérêt et sont reçus «comme espèces sonnantes dans toutes les caisses publiques et particulières». Le montant des émissions s’élève dans un mouvement qui s’accélère jusqu’en 1796. Face à cette prolifération de papier-monnaie, le gage des domaines nationaux auquel on continue à faire référence devient illusoire et la valeur des assignats s’effondre. Le 19 février 1796, le Directoire décide d’arrêter les émissions et de détruire solennellement la planche à billets, place Vendôme. L’assignat est remplacé par un nouveau papier-monnaie, le mandat territorial. La dépréciation de cette nouvelle monnaie est si rapide qu’une seule coupure est imprimée et le 17 mai, on revient à la monnaie métallique.Dès 1792, un observateur de l’époque, Boislandry, déclarait : « Ce qui a le plus contribué à discréditer les assignats, c’est qu’il en a été mis successivement en émission pour des sommes trop considérables ». De fait, le montant des assignats en circulation passa de 560 millions de livres en janvier 1791 à 34 500 millions en février 1796 ; dans le même temps, la valeur de 100 livres assignats chutait de 96,74 à 0,50.” (de http://sceco.univ-poitiers.fr/hfranc/assignats.htm)
Pas de doutes, le lieu a du cachet, c’est un beau bar à l’ancienne, mais plus que cela. J’imaginais un petit bar, c’est un beau bistrot avec un baby foot, un juke box garanti d’époque, une déco vintage certifiée. De plus la disposition de la salle est réussie, il y a à la fois des tables pour 4 et deux grandes tables au milieu pour les réunions d’amis. On rate facilement le lieu quand on vient, motorisé, des quais de Seine car il est tout de suite sur votre gauche quand on s’enfonce dans la rue Guénégaud.
Il y a une jeune femme derrière le comptoir et en salle, très sympathique, souriante. En allant aux toilettes j’aperçois le patron cuistot dont j’ai pas mal lu sur internet, en bien comme en mal. En tout cas il a l’air d’incarner son lieu, d’être sérieux aux fourneaux, mais on n’a pas envie de le bousculer dans ses habitudes 🙂
Jeton un oeil à ce menu Entrée/Plat/Dessert à 17 ou E/P ou P/D à 14 euros. 17 euros c’est cadeau! Allez ni mon pote ni moi, ni d’ailleurs la serveuse, n’avons encore goûté un brie chaud. Ca me parle tout de suite ce genre d’assiettes car on voit que le brie n’est pas le parent pauvre d’une entrée qui utiliserait un fromage chaud pour dissimuler son manque de générosité. Non, ici, le brie est posé tel quel, cash, sur une baguette ouverte, grillée, ça ne triche pas, c’est clair, pareil pour la tomate coupées en tranches inégales et servie copieusement : une bonne entrée en matière que ce brie.
Nous avions demandé saignant pour le rumsteak mais j’ai été tellement déçu par des cuissons de viande ratées, notamment pour le saignant, que je ne m’attendais pas à grand chose. Quel étonnement en plongeant mon couteau, la viande est saignante au dedans alors qu’elle est croustillante au dehors. Les frites maison sont bien bonnes ma foi, pas grasses, régulières dans la coupe.
On accompagne ça d’un vin rouge en cubit, 50 cl, très correct.
On achève ça avec une coupe de fraises avec au choix sucre, chantilly, ou glace vanille. Va pour la chantilly. Autant notre entrée et notre plat sont arrivées en rythme, autant le dessert se fera attendre sans qu’on sache trop pourquoi. La serveuse et le patron étaient tous les deux derrière le comptoir mais on n’a pas su ce qui se passait. Comme je le disais précédemment, on vient ici profiter d’un lieu resté dans son jus et ayant préservé son âme donc on ne bouscule pas pareil endroit lors d’une première visite, on profite et on prend son temps. Et voilà notre fraise qui arrive. Elle est parfaite, j’aime la présentation, c’est gourmand et décalé mais pas chichiteux régressif (je déteste le dessert dans le verre avec le bonbon haribo).
On s’en est tiré pour 25 euros par tête en ayant très bien mangé dans un lieu magnifique. Je garderai l’adresse en tête lors de mes prochaines visites dans le quartier car il est vrai que je n’en ai pas 10000 dans le genre dans un large périmètre à la ronde. Par expérience, ce genre de lieux, bistrots méconnus :
– soit ils sont surcôtés par une clientèle qui s’en est amourachée, parce que “c’est tellement cool d’aller dans un lieu comme ça dans un quartier chic”, mais qui n’a pas par ailleurs une large culture bistrotière, du coup les commentaires vous vendent de l’authentique, au détriment d’une prestation de qualité (cuisine et service).
– soit ce sont de vrais îlots qui ont su préserver une clientèle d’habitués sans pour autant se fermer aux nouveaux arrivants. Celui-là est clairement dans la seconde et 17 euros pour un menu complet, dans une ville où un plat du jour vaut facilement 17, c’est donné.
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